Le Pare-tempêtes
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Messages : 171
Date d'inscription : 16/08/2018

Ivre en enfer Empty Ivre en enfer

Mar 7 Jan 2020 - 22:21
Le CC de l'Enfâeerrrr
Silver Phoenix
Silver Phoenix
Messages : 134
Date d'inscription : 27/08/2018
Age : 26

Ivre en enfer Empty Re: Ivre en enfer

Mar 7 Jan 2020 - 23:26
L'enfer, c'est les autres.

Combien de fois se l'était-il dit ?

Tellement de fois qu'il a l'impression que c'est lui qui a créé cette expression.

Rien que penser aux autres l'étouffe. Il s'imagine malgré lui noyé dans une foule mobile et informe. Sans que personne ne s'en aperçoive.

Après tout, il est un déchet, non ? Les gens devraient être contents qu'il souffre, là. Ou au moins, ahuris. Alors, pourquoi personne ne le regarde ? Pourquoi tout le monde l'ignore ? Pourquoi tout le monde fait mine qu'il n'existe pas ?

Il serre sa guitare contre lui, appuyant son dos sur le mur sale.

Dans les Abysses de Paris.

Ses doigts sont rigides à force de gratter les cordes rouillées. Il ne mendie même plus, depuis le temps qu'il avait compris que ça ne servait à rien. Il préfère subtiliser tout ce qu'il peut prendre, il est inexistant, de toute façon ! Un portefeuille est si facile à voler quand il est négligemment rangé dans une poche arrière d'un pantalon !

Mais là, il n'en peut plus. Il ne veut plus vivre comme un parasite. Il ne prend même plus la peine de s'acheter de quoi manger. Il préfère maintenant s'assomer plutôt que se revigorer.

Le souterrain l'étouffe. La foule l'étouffe. Son propre corps l'étouffe.

Et il descend un pack entier. Cul sec à chaque bouteille.

La bière a un goût d'eau, maintenant.

Il doit satisfaire ce besoin viscéral de remplacer entièrement son sang par de l'alcool.

Sa vision se brouille. Et il a désormais l'impression que les vapeurs d'alcool ont remplacé l'air. Bercé par ce puissant parfum, il se couche à même le sol dur et froid. Sa tête est lourde comme si on lui on avait injecté des litres de plomb dans son cerveau. Son cœur bat sourdement dans sa poitrine. Et il tremble. Et il croit gémir aussi, mais il n'en est pas certain. Ses oreilles bourdonnent trop.

Il ne sait pas si les autres le regardent.

Mais cette ignorance suffit pour qu'il se sente exister.

Peut-être qu'il existerait davantage s'il se laissait mourir lamentablement par terre ?

Ses paupières se baissent.

Il ne veut plus bouger.

Il veut que les autres impriment l'image de sa carcasse à même le sol.

Tant pis s'il paraît misérable.

La léthargie s'empare lentement de son être, traverse ses membres, coupant ses pensées sur la réalité comme un pantin de son marionnettiste.

Et c'est parfait.


Dernière édition par Silver Phoenix le Mer 8 Jan 2020 - 0:03, édité 1 fois
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Messages : 171
Date d'inscription : 16/08/2018

Ivre en enfer Empty Re: Ivre en enfer

Mar 7 Jan 2020 - 23:30
A toi mon ami, qui as trop bu
Et bravement décidé
De faire de la corde à sauter

Ton cou rompu, la fiole brisée
Es-tu parti boire la rosée
Des nuages du paradis ?


  Toi, compagnon qui a pensé
Que ce serait une bonne idée
D'aller cuver à l'accrobranche

Écrasé sur le sol, évaporé au ciel
Je me demande, ton âme a-t-elle
Fini sa cuite au purgatoire ?


  Quant à toi corniaud qui roula
Avec ton sang au rhum-coca
En prenant les gens pour des quilles


J'espère qu'en Enfer tes tourments
Sont vus en double par tes billes
Écarquillées et effarées.
Pantouffe
Pantouffe
Messages : 833
Date d'inscription : 27/08/2018
Age : 28

Ivre en enfer Empty Re: Ivre en enfer

Mar 7 Jan 2020 - 23:30
Les bouteilles s'alignaient comme autant d'aristocrates crasseuses, encanaillées après une nuit à côtoyer des lèvres roturières et des langues piquantes d'alcool. Des petites dames de verres, brunes, vertes et translucides, toutes parées pour l'occasion de leurs plus jolies et criardes étiquettes- pourries par l'humidité puis grattées par des doigts nerveux. Le soleil ricochait sur elles en dispersant alentours des reflets ondoyants qui venaient jouer sur les genoux de Luccio.

Genoux nus, cerclés de jean rongé. Peau rougie, délicatement écorchée de s'être trop de fois pressée et frottée sur le sol- parfois marquée de demies-lunes blafardes, quand des ongles vernies s'y enfouissaient longuement. Les ongles azurés de Luccio, sur la main fine et brune de Luccio, La main de son bras long aux déliés harmonieux, déployé d'une épaule à l'arrondis croquant, frôlée d'une clavicule qui courrait jusqu'à sa sœur jumelle. Au-dessus, la peau de velours de son cou et un visage de fille. Délicat mais taclé d'ombres trop accentuées. Celles des cernes repeintes pour mieux être exhibées, celles des pommettes creusées aux doux creux de satin. Quelque part dans un désastre soyeux de peau brune, de duvet translucide et de mèches vagabondes ruisselantes en rivelets bleutés, le cœur palpitant de son visage se froissait et se défroissait en bouton carminée. Sa bouche écorchée, accrochée au goulot d'une bouteille.

Une de plus qui rejoindrait ses consœurs exsangues sur le bord de la fenêtre.

Ses doigts souples jouaient avec les bouchons crénelés, flirtant à chaque contact furtif avec des coupures à venir. Quelques une de plus sur un corps déjà raturé jusqu'à l'os. Jusqu'à l'âme. Quelque part dans son crâne, un brouillon d'âme recraché par la divinité capricieuse qui s'échinait à concevoir des Hommes. Balancée à la corbeille avant d'avoir été achevée, et tassée dans son corps à lui par un ange distrait ou malveillant. C'était ainsi qu'il se serait expliqué sa conception si Luccio avait usé de son imagination à quelque rumination lyrique sordide. Mais il n'utilisait le plus souvent les ressources de la sienne qu'à des fins strictement pratiques.

Comment mener une vengeance à terme. Comment manipuler les apparences à son avantage. Comment échapper à la vigilance de l'hydre scolaire. Comment se procurer de l'alcool et des cigarettes tout en étant mineur. Comment supporter d'exister jusqu'au matin suivant. Pour tout cela, il avait tant des idées qu'un certain art de la projection mentale. Il avait longuement anticipé cette journée, le soir au fond de son lit, tendu sur le matelas, immobile, comme si chaque plis de la couverture avait le coupant d'une lame de rasoir. Il ne parvenait pas à trouver le sommeil avant d'avoir vécu le lendemain. Jamais. Jusque dans les bras lourds de Morphée son corps gardait une tension électrique. De rêves en cauchemars, il ne faisait que s'aiguiser un peu plus au gré des heures nocturnes, et quand il s'extrayait du lit au matin, il était aussi dur et affûté qu'une arme. Le lit n'était pour lui qu'un fourreau dont il attendait d'être tiré pour brandir à nouveau à la face du monde ses yeux de ses silex, ses lèvres acérées et ses mains sèches dont les doigts délicats étaient tissés de longues torsades d'acier. Quand il parvenait aux grilles du lycée, c'était avec une attitude, avec un plan et avec les moyens de le réaliser. Hier soir, il avait fait son choix. Ce serait l'ivresse ou la mort.

Pour cette fois, il avait fait le choix de l’ivresse.
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