CC N°Vertue est le nom de scène de ta chère maman : Thé de patience

Patience.

Se dit-elle en claquant nerveusement son stylo contre le bureau.

Elle allait bien finir par comprendre cette leçon !

C'est maintenant la troisième fois qu'elle relit son cours. En train de tout retaper et reclasser sur son ordinateur. De connecter toutes les informations qu'on lui vomissait dans les yeux.

Le cours est mal écrit. Mal organisé. Il y a même des fautes d'orthographe et de grammaire qui feraient hérisser les poils de tout Grammar Nazi qui se respecte.

Bon. C'est probablement à cause de la fatigue si elle n'arrive pas à comprendre exactement la leçon. Il faut dire qu'elle n'a pas beaucoup dormi non plus, cette nuit.

La lumière bleue de l'écran commence à lui brûler l'œil gauche derrière ses fines lunettes, comme si elle lui éclatait la rétine. Elle ne s'était pas rendue compte que son œil grillait pendant qu'elle se torturait mentalement.

Patience. Patience.

Sa tête décompose "Patience" en "Pas Science".

N'importe quoi.

Elle lutte un instant pour régler la luminosité de l'écran infernal. Au minimum. C'est bien mieux comme cela.

Et c'est à ce moment-là, lorsque son esprit à été distrait par la préservation de ses yeux, qu'elle a une idée de génie.

Et si je faisais une pause ?

Bien sûr. Elle n'y avait pas pensé. Elle ne sait même plus depuis combien de temps elle révise.

Elle se lève. Son dos fait mal. Ses jambes à moitié nues se sont décollées de la chaise. La sueur a fait Velcro, se dit-elle blasée.

Son dos arqué et ses jambes engourdis lui font bien sentir la gravité. Son poignet droit est rigide. Elle ne peut s'empêcher d'imaginer des insectes grouiller dans ses veines. Dégoûtant.

Elle part vers la cuisine. Du mieux qu'elle peut. Poser le pied par terre à chaque pas la brûle presque. Tout à coup, le besoin de sucre se fait sentir lorsqu'elle regarde les placards.

Du thé. Pourquoi pas une tasse de thé ?

Elle fouille dans un placard à la recherche au trésor parfumé. Un thé au citron sucré au miel fera parfaitement l'affaire.

Elle pioche un sachet. Prend une tasse où sont inscrits des mots douteux ("Vertu est le nom de scène de ta chère maman"). La remplit d'eau du robinet pour la chauffer dans le four micro-onde vieux depuis Mathusalem (depuis quinze ans en réalité, ce fossile marche encore, mine de rien).

Elle plonge le sachet de thé dans l'eau chaude. Des volutes de vapeur montent doucement dans l'air comme un petit volcan. Elle voit le liquide cristallin se colorer d'or au fil des minutes. La senteur acide du citron embaume ses narines, ce qui la fait saliver d'envie.

Un brin de miel de fleur pour apporter de la douceur. La substance épaisse et ambrée se dissout dans le thé.

Et voici un breuvage pour se détendre un bon coup.

Elle porte la tasse au message insolent à ses lèvres. Le thé coule dans sa gorge, la réchauffe, l'apaise. Le goût acidulé du citron et la température de l'eau picotent agréablement sa langue. La vapeur s'étale allègrement contre ses lunettes.

Le stress et la frustration sont toujours là, mais moindres comparé à tout à l'heure.

Elle doit se calmer. Elle doit faire preuve de patience.

Ce thé est un thé de patience.

Voilà. De la patience liquide et parfumée.

Elle va comprendre la leçon.

Elle veut comprendre la leçon.

Elle va réussir.

Lutte contre les démons qui lui hurlent qu'elle ratera tout ce qu'elle entreprendra. Des démons qui ont son visage.

Elle serre l'anse entre ses doigts craquants. Frustrée. Mais déterminée.

Elle a juste besoin de patience.

Pardon en fait j'ai rien écrit.
Mais voici à quoi Thé de patience me fait penser.
Une tasse de thé posée sur une table, avec un filet de fumée qui s'en échappe,
Et des gens autour qui discutent paisiblement.
Peut-être en attendant quelque chose, qui peut mettre beaucoup de temps à arriver.
C'est paisible et ça sent bon.
C'est une image dans les tons brun, rose pâle, beige, blanc. Avec une petite odeur de jasmin, ou d'agrumes et de bergamote.