CC N°32 : Balade septentrionale

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Le soleil se glissa par le jour percé dans le mur de l’abri. Vendel s’éveilla comme on émerge d’une eau tiède, ses couvertures rêches glissant alors qu’il se redressait. Déjà il se sentait plein d’énergie, sans doute grâce à cette nuit passée dans un lit et au chaud.
Il posa ses pieds sur le sol glacé, s’arrachant à ses draps, et s’étira longuement, chacun de ses muscles se tendant et se vitalisant doucement. Puis il se rapprocha du poêle, ranima les braises et entreprit de faire son café. Il s’habilla rapidement avant que le froid qui régnait dans la pièce ne le tétanise et rassembla ses bagages. En quelques minutes, le sac était prêt, la couverture roulée, le café bu.

Dehors, le glacier était encore tapi dans l’ombre des sommet voisins, et se poursuivait en serpentant vers le fond du col enténébré. Le sentier en épousait le bord et disparaissait un peu plus loin derrière un ressaut des falaises. Il s’y engagea résolument, ses bottes crissant sur les pierres poreuses qui le jonchaient. Au dessus de lui le ciel était d’un bleu vif, lumineux. Le vent soufflait comme la veille, mordant, s’acharnant sur ses vêtements, s’agrippant à toutes prises qu’il lui offrait. Il avançait ainsi, un peu courbé... (INACHEVE)

La toundra de Limoon était décidément magnifique.

Des gouttelettes d'eau s'étaient cristallisées sur les étendues d'herbe d'un vert sombre, les recouvrant d'un élégant manteau de givre étincelant sous la lumière dorée de Sorya. Quelques points d'eau froide riches de vie perçaient la terre, et reflétaient la couleur céruléenne du ciel qui s'éclaircissait peu à peu sous l'effet de l'aube. Un léger vent frais animait les feuilles des quelques petits arbres et créait quelques vaguelettes sur les surfaces d'eau.

Le jeune Kylma se sentait définitivement chez lui, au milieu de ce paysage aux couleurs froides et pourtant vivantes. Il s'amusait à craquer le givre sous ses bottes massives. Il avait cette étrange mais agréablement impression de marcher sur du sel gelé. Cela faisait des jours qu'il errait dans la toundra, préférant les grandes étendues sauvages vides de toute civilisation au rythme insoutenable des villes. Pourquoi s'embêter à gagner de l'argent pour posséder un territoire exigu, et manger de la nourriture de mauvaise qualité emballée dans du plastique, alors que tout ce dont il avait besoin se trouvait ici ? De la viande et du poisson frais, des plantes comestibles, et même des petits œufs d'oiseau si il avait de la chance. Et cet air froid frottant sa joue, quel délice !

En se promenant sur l'herbe cassante, Kylma contempla le ciel, le regard rêveur. Sur cette toile d'une nuit mourrante, Sorya se levait pour donner naissance à un autre jour, déchirant les ténèbres de ses rayons dorés. Une onde de chaleur caressait la peau de Kylma, ce qui contrastait avec la fraîcheur du vent. L'éclat écarlate de Garius flamboyait dans les cieux, plus que celui bleuté de Laïa, alors que Luria s'évanouissait à l'horizon, sa limbe argentée éclairant désormais comme une petite chandelle. Quelle chance de pouvoir observer aussi nettement les trois lunes, pensa le jeune homme. Le firmament constellé d'innombrables étoiles très lointaines se déployait fièrement, l'une d'elles brillant plus que toutes les autres, visible même à travers le voile du jour, le dernier coup de pinceau à ce paysage si atypique.

Meria.

Kylma était nostalgique à chaque fois qu'il la regardait, les souvenirs de sa chère mère défilant lentement dans sa tête. Meria. L'Etoile Eternelle. Une source inépuisable de questions pour les scientifiques due à sa longévité exceptionnelle pour une géante bleue, et le point culminant d'un songe pour lui. Sa mère était superstitieuse contrairement à lui, et lui racontait de nombreuses légendes à propos de cette étoile singulière. Meria était pour elle l'endroit où partaient les âmes des défunts, les enveloppant de son linceul bleuté, les abritant à jamais. La maladie l'avait emportée quelques années plus tôt, après un long combat douloureux, mais elle était en paix, lui disait qu'elle reposerait pour toujours au sein de la chaleureuse Meria.

Évidemment, Kylma ne croyait guère à cette légende ; il était bien trop terre à terre. Mais il ne pouvait s'empêcher de penser que sa mère veillait sur lui à travers la lueur de Meria. Dommage qu'elle se trouvait si loin, se lamentait-il. Il aurait mieux senti sa chaleur si c'était Sorya qui recueillait les morts. Mais non. Elle, elle donnait la vie, insufflait de l'énergie à la planète.

Kylma sentit son estomac vibrer, ce qui le coupa de ses rêves et de ses souvenirs. Manger un poisson grillé ne serait vraiment pas de refus.

Alors qu'il salivait d'avance sur son repas matinal, il se dirigea vers des points d'eau, analysant lequel serait le mieux pour attraper un gros poisson. Après plusieurs minutes à se balader dans la toundra à juger tous les points d'eau qu'il trouvait, il s'arrêta sur un où dansait en tourbillon un imposant banc de poissons à quelques mètres de la surface. Parfait.

Kylma fixa ce tourbillon, et leva une de ses mains gantées, la paume face à l'eau. Le froid ambiant rendait l'eau dense, la geler ne devait pas être compliqué, s'affirma-t-il.

(inachevé)