Le Pare-tempêtes
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Leer
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La ville des mimes, le four aux fées Empty La ville des mimes, le four aux fées

Mer 27 Jan 2021 - 21:45
Je crée les sujets plus vite que mon ombre !
Malnir
Malnir
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La ville des mimes, le four aux fées Empty Re: La ville des mimes, le four aux fées

Mer 27 Jan 2021 - 22:59
Il est arrivé le soir, ses cheveux blancs et bouclés, sa barbe et sa peau pâle lui donnaient l’aspect d’une statue de satyre grec taillée dans le marbre aux yeux d’onyx. Il portait un manteau de bon tissus crème qui battait à ses jambes et semblait d’un moelleux à s’endormir à son contact. Il est entré dans le théâtre municipal comme s’il était chez lui et ses pas résonnèrent sur les dalles de polies du hall. Ceux qui l’ont vu arriver savaient qu’il ne venait pas seul, mais accompagné de son peuple.

Le lendemain on se bousculait pour le voir sur scène, ses gestes virevoltants et expressifs, son visage froid mais plus vivant qu’aucun autre. Un tel silence planait sur la salle qu’on aurait pu entendre les larmes que versaient nombre de spectateurs. Quand il eu finit, un tonnerre d’applaudissement naquit instantanément, mais paru comme ouaté, dilué par ce trop plein de silence. Quand s’inclinant il exhiba un sourire rutilant et toujours aussi muet, les vivas redoublèrent.

Le Roi des Mimes d’un geste extravagant releva son bras droit et apparut entre ses mains une feuille de papier qui en quelques instants c’était une petite figure d’origami, une petite danseuses aux ailes éthérées. Le vacarme qui s’exhibait un instant plus tôt fut soufflé alors que l’homme en faisait naître un peuple entier au grès d’une chorégraphie alambiquée. Bientôt il fut entouré d’une nuée de petites fées de papier, qui flottaient autour de lui. Il arriva à une extrémité de la scène et fit surgir des plis de velours cramoisis des rideaux une vasque de verre qu’il saisit d’une main. Dans son autre mains apparut un briquet d’argent qu’il alluma retourné au milieu. Alors cette flamme sembla attirer à elle toutes ces petits pliages délicats. Tourbillonnantes, l’une après l’autre les fées s’embrasèrent et le mime se trouva auréolé d’anneaux de feux . Et quand chaque papillon finissait de s’embraser, il venait se poser dans la vasque qui fut bientôt emplie de cendre. Alors l’homme la lança dans les airs, elle voltigea disparut en répandant son contenu qui plana en un lourd nuage iridescent vers le public pétrifié. Quelle surprise quand ils virent que chaque particule qui pleuvait sur eux était une infime paillette d’or !

Le Roi des Mimes leva alors les bras et se fendit en une révérence plus extravagante que la précédente. Et son peuple surgit des coulisses, et ils surent qu’ils resteraient autant qu’ils voudraient ; la ville leur appartenait désormais.

La ville des mimes, le four aux fées Noir_e11
ziel
ziel
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La ville des mimes, le four aux fées Empty Re: La ville des mimes, le four aux fées

Mer 27 Jan 2021 - 23:05
La ville des mimes est un endroit fort agréable. On s’y balade joyeusement, échangeant en sautillant de merveilleuses discussions passionnées et pleines de savoir concernant pleins trucs et autres joyeusetés. Cette bourgade possède nombre de plaisantes petites échoppes, toutes aussi étranges les unes que les autres. Des bâtisses comme on en voix peu. Il y a des biscornus, des sans fenêtres, des sans toits, des toits, il y a des fondus dans le sol, des qui s’élance en spirale folle… 
Le four aux fées, lui, ressemble à une grosse porte. On y entre facilement mais l’intérieur est dépourvu de tout ce qui ressemble à une maisonnée, et après tout c’est bien normal ! car ici, on vient pour sentir les lumières de la nuit !

C’est encore l’un des rares endroits où l’on peut côtoyer et interagir avec le petit peuple ! un lieu pleins de surprise et d’une grande importance !

Le four au fées attire, il envoute et avale les voyageur et les curieux !

C’est sa porte qui produit cet effet là ! Elle est a demi fermé, ce qui laisse transparaitre son intérieur. Le chaland ne peut s’empêcher d’y jeter un coup d’oeil ! mais à peine a-t-on effleuré ses battants, que l’on se fait aspiré par l’inconnu ! une plongée vertigineuse et inarrêtable ! Direction le four, là où, cachées et ricanants dans la moiteur de l’obscurité, nous attendent avec impatience les fées et tout le petit peuple !
Silver Phoenix
Silver Phoenix
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La ville des mimes, le four aux fées Empty Re: La ville des mimes, le four aux fées

Mer 27 Jan 2021 - 23:25
Ah, le quartier des artistes de rues !
Plein de vie et d’entrain ! Même tard le soir et tôt le matin !

Devant le petit miroir terni par l’âge, Darius se grime le visage. Un fard blanc sur les joues, du noir pour souligner ses yeux, un beau rouge flamboyant sur les lèvres… Encore quelques gouttes noires juste en dessous des yeux et… parfait.

Il lui suffit d’enfiler son long manteau sombre et un bonnet de laine pour affronter la froideur de la nuit. L’hiver est particulièrement rude, cette année. Mais ce n’est pas cela qui va tuer l’art. Et qui va l’empêcher d’empocher du fric.

Il sort de chez lui, et subitement, il se fige. Un vent glacial, violent, s’insinue en lui jusqu’aux os. Il en oublie comment respirer pendant une seconde. Il se reprend. Le maquillage s’est comme cristallisé sur sa peau.

Darius soupire, laissant filer une brume diaphane entre ses lèvres écarlates. Et se met à marcher, rigide comme un automate. La pâle lumière des réverbères lui offre un peu de réconfort. Elle fait doucement luire les plaques de givres sur l’asphalte.

De la musique commence à se faire entendre. Des voix, aussi. De plus en plus fort. Il pourrait même entendre le tintement des pièces dans les poches…

Finalement, Darius retrouve sa place habituelle dans ce quartier, entre un violoniste enjoué et une cracheuse de feu. Il dépose son gobelet sur le sol, et commence son spectacle.

Le violoniste lui offre un sourire solaire pour le saluer. La cracheuse lui souffle malicieusement une petite flammèche en guise de révérence.

Aussitôt, Darius sent cette petite chaleur au creux de son ventre. Et cette irrépressible envie d’incurver ses lèvres.

Lorsque le violoniste joue un morceau endiablé digne des plus grands virtuose, Darius l’accompagne fièrement avec son violon invisible.

Lorsque la cracheuse embrase l’air gelé de l’hiver telle une puissante dragonne enragée, il est le preux chevalier qui la combat pour sauver le royaume des fées.

Darius joue comme un enfant.

Dans ce quartier où il faut mimer le bonheur de vivre.
Leer
Leer
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La ville des mimes, le four aux fées Empty Re: La ville des mimes, le four aux fées

Mer 27 Jan 2021 - 23:42
Leer se vautra sur son lit. « Qu'est-ce que je vais bien pouvoir faire de ma journée ? » Cet être étrange se rappela alors que son rythme était plutôt nocturne, et que sous la couette il faisait bon réfléchir.
Une journée plus tard, Leer se demanda « Qu'est-ce que je vais bien pouvoir faire de ma nuit ? »
Sa réflexion fut interrompue par un coup bref sur la porte. Ce n'était pas « maman ». « Maman » ne donnait pas dans les coups brefs.
Il s'agissait de quelqu'un de très grand, très maigre, portant un chapeau mou et un costume bleu marine. Il se pencha vers la paire de cernes qui lui faisait face et tendit une carte.
« Je viens pour la chaudière. »
Leer prit la carte et regarda droit à travers en essayant de sa rappeler ce que l'éthique lui recommandait comme réaction. Dire « Vous mentez ! » ne semblait pas très poli, et fermer la porte pour repartir au lit manquait de style. Ul leva donc un sourcil.
- Votre cuir chevelu, monsieur, fit remarquer le bonhomme.
Leer s'aperçut que son cuir chevelu glissait vers la gauche et il le rattrapa juste à temps.
Le mec avait pas fait un geste pour se baisser. Gouafre.
- Je vous emmène en voyage, en fait.
- Hein, pardon ?, dit la touffe de cheveux que deux mains remettaient en place
- J'attendais que vous réagissiez pour la chaudière ou quelque chose mais vous avez l'air disposé à croire n'importe quoi, alors...
Quel toupet. Leer en resta bouche bée, mais pas longtemps.
- C'est vraiment pas sympa, c'est mes cheveux, ils...
- Tatatatatatata. On ne blâme pas les cheveux, Miladylord.
- V-vous savez que je suis agenre ?
- Je sais bien des choses, Leer Troublesome.
Un autre sourcil fut levé.
- Je ne m'appelle pas Troublesome.
- Ca sonnait mieux. Venez.
- Mais, je ne me suis pas rincé la bouche !
-Eh bien vous passerez devant, ça repoussera les monstres ! Venez !
Dans un monde idéal, Leer l'aurait suivi, mais soyons réalistes deux minutes, Leer était en pyjama et n'avait pas ses clés.
Ul alla chercher son sac pour ne pas s'enfermer dehors quand même, offrit un petit thé au sucre à monsieur Quel-que-soit-son-nom pour le faire patienter, en profita pour se changer, hésiter sur les fringues, se secouer, attraper un t-shirt propre au passage et se rincer subrepticement la bouche, ul alla aux toilettes, fourra trois barres céréales dans son sac parce qu'on savait jamais, essaya de se rappeler combien d'allers-retours dans les escaliers cela venait de représenter et si c'était bien de faire du sport comme ça ou mauvais pour ses genoux, se blâma pour avoir pensé comme un petit vieux. Un « TUT-TUTTUTUTUTTUTUT » s'éleva de la cuisine. Ul se rappela aussi d'éteindre son ordi et remettre le beurre au frais, et normalement ce serait bon pour partir.
« Bon, on part maintenant ? » était donc une question pertinente, cependant elle fit sursauter Leer qui avait trois clous serrés entre les lèvres et un marteau en main.
- Euh, oui. Oui, absolument., cracha le Leer en jetant le tout derrière la porte.

Ils partirent joyeux et sémillants de par les chemins de Cxxx. Leer, s'émerveillant de la lumière du soleil, se brûla les deux rétines et continua en pleurant. Monsieur chapeau mou était plus digne. C'était un homme à chapeau mou.

Quand le soleil baissa, ce qui était déjà arrivé depuis plus de deux heures -on est en 2021, le soleil a autre chose à foutre que d'éclairer les gens, sérieux- Leer sécha ses larmes et aperçut un paysage merveilleux, fait de nuages barbes-à-papa et de papas aux barbes en nuage. Personne ne bougeait, et personne ne parlait. Cela mit l'être légèrement mal à l'aise.
« Hum... », al fouilla ses poches et en retira la carte,
« Corbeau Corbeau ?
- Ce n'est pas mon nom.
- Ah. »
Leer essaya de mieux lire.
« Cherchez pas, cette carte est bison.
- Vous voulez dire bidon ?
- Non. »
La carte s'évada des mains de Leer et se mit à galoper dans les plaines de barbe-à-papa.
« ...
- ...
- Vous vous appelez comment ?
- Mes parents n'avaient pas d'idée.
- C'est où ici ?
- C'est chez moi.
Encore une fois, « Je te crois pas » semblait familier. Cela dit, cette curieuse nationalité expliquait le problème du nom. Leer désigna les papas.
- Ils ne parlent pas ?
- Ils ne veulent pas. Ce n'est pas viril.
Leer fit une connexion.
- Alors vous êtes bilingue ?
- Oui.
- Allez-y, dites-leur quelque chose.
- Ca ne se fait pas.
- Alleeeeeez !
- Non.

Faute de démonstration, Leer scruta. Il y avait des papas qui restaient platement immobiles, les yeux fixés dans le vide ou sur quelqu'un. Il y en avait qui bougeaient et semblaient communiquer par gestes. C'était plutôt ridicule.
Il en aperçut dont le but semblait être de draguer d'autres papas. Il s'était orné de plumes de paon et lançait des oeillades de type « sombre mais profond » autour de lui. Leer eut envie d'aller taper la discute.

Une maison attrapa son regard, dans le sillon de l'homme emplumé. Elle était à quelques centimètres au-dessus du sol.
« C'est quoi, ça ?
- Oh, taisez-vous et avancez, voulez-vous !, pressa monsieur FBI. Il avait rougi et pressait le pas. Peut-être, pensa Leer, avait-il secrètement honte de son appartenance à ce village.

Après avoir marché sur des nuages, regardé une cascade de boue bien marron et fait un détour par le supermarché, Leer demanda à haute voix « Je peux vous appeler tu ?
Son compagnon haussa les épaules,
- Ce que tu veux.
- Ok, Tu. »

Les deux marchèrent un moment, Leer mordillant un bout de fromage qui lui avait fait envie.
-Fais attention à ta tête.
-Hein ?
Ils arrivaient dans un vaste espace cotonneux. Des voix se mirent à jouer avec les cheveux de Leer, en les raccourcissant avec des mots.
« Madeleine elle se lave pas les dents, elle fait que cracher ! -Tu te rends pas compte que tu as choqué toute la classe ?
-Bêrk, c'est super bon !
-Tu es la meilleure de celles qui savent pas se brosser les dents...
-Madeleine ! Hé ho !
-Tu as fait ton DM à vingt-deux heures ??
-Tu penseras à passer de l'huile de tournesol sur tous les joints de fenêtres !
-Vous pensez qu'avec une poulie on peut hisser un être humain ?
-Tu veux pas arrêter d'être conne ?
-Empotée !
-C'était du huit au douze décembre, c'était du huit au douze décembre...
-I can't stop loving you ! I've made up my

Les musiques firent perdre les pédales à Leer. Elles se multiplièrent, se marchant sur les pieds, noyant les mille paroles, laissant juste assez de place pour mettre encore plus en valeur certaines phrases. Une main tira brusquement Leer hors de son état. Ul vacilla.
« Je vous avais dit pourtant, bougonna l'homme.
Ils étaient face à un grand four. C'était magnifique. La lueur dorée qui s'en échappait baignait le tout d'une lueur mystique et crépusculaire, chaque regard se nimbait de miel.
- O-on est arrivés ?
- Oui. Les fées vous auraient poussé là-dedans si je ne vous avais pas attrapæ. Ne me remerciez pas, c'est rien.
- C'est comme un four géant !
- Ben, oui. C'est un four... Je déteste le contact physique.
- Ah, merci euh. Tu. Et pourquoi tu m'as emmené ici ? Il faut faire un vœu ?
- Non, j'avais juste envie d'y aller. Je trouve ça joli.
- ...
- …
- …
- Tu.
- Quoi ?
- Tu veux une barre céréale ?
- En aucun cas.

Leer s'assit en tailleur. C'est vrai que c'était joli.
Le ciel devenait lavande. Leer commenca à pleurer.
- Tu fais quoi ? Demanda Tu.
- Tu comprendras quand tu seras grand.
Tu serra les lèvres. Une moue qui signifiait simultanément son dédain, sa blessure d'orgueil et sa classe. Décidément, ce petit ne manquait pas de ressources.
Leer attendit longtemps, en pleurant. Au bout d'un moment, Tu lui dit qu'il faisait chier quand même et ul en convint. Ils repartirent par les nuages.

- c'est pour ça qu'ils peuvent pas me blairer, mais j'ai toujours dit que je n'avais aucune place à cet endroit de toute façon !, exposait Tu.
- Hm-hm. Ouais, c'est clair. Toute façon, ils ont jamais compris que tu...
Bras-dessus, bras-dessous, Leer et Tu rentraient à la maison.
La maison qui flottait à quelques centimètres du sol n'étaient pas là sur le chemin du retour. C'était probablement lié à la gigantesque hélice qui ornait son toit.
Par contre les papas silencieux étaient là. Ils les regardèrent passer. Enfin, Leer espéraient au moins qu'ils les remarquaient. C'aurait été déjà ça. Peut-être.

La maison de Tu était ornée de vastes fleurs peintes par quelqu'un de grand, mais sans échelle. Il y avait aussi un dessin d'échalote ou d'oignon sur la porte.

Ils se dirent au revoir. Leer n'osa pas trop le dire, mais il ne savait pas du tout comment rentrer chez soi. Il commença par tourner le dos à la maison de Tu et regarder l'endroit. Dans ce lieu, les températures n'existaient pas.
Pantouffe
Pantouffe
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La ville des mimes, le four aux fées Empty Re: La ville des mimes, le four aux fées

Jeu 28 Jan 2021 - 0:11
Uliel est roi, il a mangé la salamandre. Elle est tombée sur son visage pendant qu'il dormait, et la mère a dit : c'est le signe d'un grand destin. Les poètes ont écris pas plus tard qu'un siècle ou deux auparavant qu'il s'agissait d'un couronnement par la providence même, que celui qui endormis aurait au front les pattes d'une salamandre serait choisi pour devenir le roi. Ceux de l'époque actuelle ont statué qu'il s'agissait toujours d'une vérité inébranlable. Il a été vérifié que nul n'avait posé ni appâté la salamandre ici, qu'aucune main n'avait été positionné son petit corps visqueux sur la poutre au-dessus du lit d'Uliel, qu'aucun bonbon pour reptile n'avait été disposé là afin de l'attirer. C'est le hasard tout seul qui a soufflé dans le dos de la salamandre pour la conduire dans la maison d'Uliel, puis dans sa chambre, et au-dessus de son lit, et enfin, sur son visage aplatis par le sommeil. Les caméras l'attestent, et elles sont nombreuses, chez Uliel comme à travers tout le reste de la ville. Et elles le resteront, car en ce lieu, en ces temps, Uliel est devenu le roi du silence.

Tout a commencé par un changement de paradigme. Quand il est devenu évident que le monde était un endroit trop bruyant. Qu'il y avait trop de gens, trop de machines, trop de crissements mécaniques, de monteurs vrombissants, de trains hurlants, de chiens qui s'aboyaient dessus, de conducteurs ivres, de chauffards sobres, d'étudiants en vélo, de jeunes en trottinette, d'enfants qui revenaient de l'école, de parents au téléphone, trop d'ambulances, d'appels, trop d'ondes dans l'air, trop de fils électriques, trop de perturbations radio, trop de vent gueulard entre les immeubles, trop de coups aux carreaux, trop de chats grattant dans leur litière, trop de gens au fond des hôpitaux, trop de draps qui se froissent, trop de doigts qui craquent, trop de bruits de boutons sur les télécommandes, trop d'écrans allumés, trop d'écouteurs qui grésillent, trop de ventilations d'ordinateurs, trop de compacités électroniques agitées d'une vibration tenue- trop de bruits. Trop de bruit tout le temps et partout, d'un bout à l'autre du globe.
Quand on a découvert que jusqu'à l'océan était parcourue de bruits constants, diffusés sans fin à travers les abysses, que même les pôles émettaient d’interminables séries de craquements, inaudibles à l'oreille seule, mais perceptibles par les machines, nous aurions dû comprendre qu'il était temps d'adopter une nouvelle philosophie. Mais il a fallut attendre encore. Il a fallut d'abord que tout le monde prenne sa place dans le dialogue mondiale qui faisait frémir la toile, que tout le monde donne son avis, débatte, s'exprime, que tout le monde parle de lui, avec sa voix, sa voix dans des milliers d'oreilles, ou juste avec ses doigts, le cliquetis maniaque des doigts sur le clavier. Il y a eu un temps l'apologie du bruit, l'ère du brouhaha, une époque de capharnaüm où rien ne comptait plus que de faire entendre sa voix, que de témoigner de son existence par une empreinte sonore, que de dire son fait, son goût, sa vérité.

Et puis, les premières études ont commencé à faire parler d'elles. Tout doucement d'abord... Elles sont venues sur la pointe de leurs souliers noires, en petites lettres dans les articles scientifiques. C'était le matin, elles roulaient hors du du lit, levées sur les coudes. Elles étaient discrètes. Elles supposaient, soulevaient des hypothèses, chuchotaient des données. Elle n'osaient pas encore dire qu'elles avaient raison, il leur manquait l'aplomb. Mais elles ont commencé à faire parler d'elles. Les petits caractère se sont étirés en lettres d'imprimerie, elles ont pris l'ampleur des nouvelles importantes. Il est devenu moins facile d'ignorer les études : c'était écris en gros. Plus visible.
La science avait découvert la nocivité du bruit. La manière dont il déformait tout, jusqu’à la trame même de la chair. On s'est mis à parlé de la façon dont le bruit accélérait la multiplication des cellules cancéreuses tant il mettait de vibrations partout, comment cette force incontrôlée détricotait l'ADN une onde tumultueuse après l'autre. On a appris avec horreur que la formation des pensées dans un crâne pouvait être perturbée, influencée par le bruit, son intensité, sa provenance. Que les informations circulant entre les neurones pouvaient être bousculées et altérées par lui. Que rien dans l'espace ne pouvait échapper à son emprise délétère.
Tout le monde s'est mis à parler des études, les gens ont commencé à ouvrir les yeux sur la cacophonie perpétuelle dans laquelle ils vivaient. Ils se sont aperçu, soudain, qu'il y avait toujours un sifflement au fond de leurs oreilles, ou un bruit sourd, ou une plainte aiguë- qu'ils ne connaissaient rien au silence, que leurs pensées aussi ne se taisaient jamais. Ils ont pu se rendre compte qu'ils n'étaient jamais tranquilles avec eux même, et qu'à vrai dire ils détestaient ça. Ils se sont mis à avoir peur.
Tout le monde en a parlé. Il y a eu comme un début de panique. Puis, dans un dernier grand embrasement de la parole, tout le monde a décidé de se taire.
Et de faire taire le monde.
L'ère du silence est arrivée. Sans s'annoncer, sans faire un plis, drapée dans une longue robe grise. La légèreté du geste, la fluidité du tracé d'un corps dans l'espace, la lenteur d'une action minutieuse, l'acte muet et sans frictions, sont devenus les nouvelles grandes vertus cardinales. On a appris à ne plus faire de bruit. A se passer de tout ce qui pouvait en produire. A chercher dans l'air une certaine qualité de clarté, une homogénéité cristalline, une placidité  particulière. On s'est mis à apprécier l'immobilité de l'air à sa juste valeur.
Bien sûr, cela s'est fait par l'écriture, puisque la parole était devenue taboue. Mais une écriture mesurée, plus réfléchie, avec le soucis de la synthèse. Les idées se sont mises à circuler plus lentement, mais plus distinctement aussi. Il est devenu plus facile de savoir qui disait quoi, dans quel but et à l'intention de qui. L'information a pris en transparence, le monde est devenu moins complexe.
La philosophie du silence a fait son apparition. On a théorisé sur ses vertus morales, sur tout ce qu'il apportait de bon à l'âme humaine. On s'est remis à parler d'âme. Énormément. On a fait l’apologie de l'épuration, on s'est mis à vouloir concevoir des esprits qui seraient comme des points de flèches. L'éducation a cherché à donner aux esprits ce caractère tranchant, cette clarté parfaite de la trajectoire, cette détermination infrangible à atteindre le but fixé. Le monde est entré dans une introspection partagée, une réflexion globale très paisible et très lente.
Après quelques années, nous étions tous tombés d'accord pour choisir le silence. Pour tout faire afin de le préserver. C'est à cette époque que les premiers dômes ont été posés au-dessus des villes, afin de mieux pouvoir les insonoriser. Ensuite, quelques pionniers ont franchi le cap de l'ablation des cordes vocales. L'opération est bien entendu vite devenue banale, on s'est mis à la pratiquer dés les premiers moments de la vie. Tout le monde y a trouvé son compte, les parents ne vous diront pas les contraire. Nous nous sommes débarrassés finalement sans trop de peine de l'organe de la parole.

Le monde s'est mis à tourner de plus en plus lentement, très doucement, comme s'il avait peur de se blesser. Au départ, il a semblé aux gens que tout allait au ralentis. Certains ne l'ont pas supporté, ont préféré une frénésie redoublée à cette décélération qui leur semblait morbide. Mais ils n'ont pas duré. Tandis que ceux qui avaient accepté le silence, ceux qui se sont voué à l'art du moindre-bruit, du moindre-impact, ont perduré et prospéré. Il n'aurait pu en être autrement, puisqu'ils avaient pour eux le secret redécouvert de la valeur des choses. Puisque le geste est devenu lent, il a pris un caractère réfléchis, conscient. Puisqu'écrire se faisait désormais dans le soucis d'atténuer la production irraisonnée et incontrôlée de sons, ceux émis par l'entrechoquement des doigts sur un clavier ou ceux d'une mine grattant sur le papier, alors il est devenu plus laborieux de communiquer- mais par la même, plus sacré également. On ne dialoguait plus pour rien dire. Et puisqu'on n'ouvrait plus la bouche que dans le soucis de se rendre expressif, puisque la parole articulée était devenu proscrite, cette parole laborieuse, sculptée, dépouillée de ses excès, est devenue bizarrement, incroyablement plus vive, plus éclatante. Plus vive car plus compréhensible, plus linéaire, plus ciblée ; plus éclatante car elle resplendissait alors comme un bijoux précieux, rendue à un trésor quand elle n'était auparavant qu'un simple déchet de la pensée.
Bien sûr, les musiciens ont d'abord protestés. Ils ont invoqué toutes les muses à leurs secours, ont cherché à faire valoir tous les bénéfices de leur art pour la santé de l'âme comme celle du corps. Mais leurs arguments n'ont pas tenu bien longtemps. Ils ont dû se résoudre au fait qu'il n'y avait plus personne pour les écouter jouer- car faire du bruit n'avait plus rien d'un jeu. Car faire du bruit n'avait jamais été aussi sérieux. Certains se sont tus d'eux même. On a fait taire les autres.

Il est venu un temps où même l'amour ne s'est mis à tolérer que les caresses les plus volatiles, que les frottements les moins audibles. Les heurts sont devenu doux, la proximité est devenu plus distante. Le toucher s'est fait muet, le frôlement et l'enveloppement sont devenu le nouveau langage de la passion. Le silence a gagné l'amour, et il ne lui a pas fallut longtemps pour s'emparer de tout le reste. Le monde a pris la légèreté de la crème fouetté.

C'est ainsi que le bruit est devenu clandestin. L'ouïe a perdu les lettres de noblesse qu'elle avait usurpé. Tout est rentré dans l'ordre. Et la grande ère du silence a entraîné dans son sillage la revalorisation de la vision. Étant donné que les gens ne pouvaient plus parler, qu'il n'y avait plus sans cesse quelque chose qui rebondissait au fond de leurs tympans, ils se sont mis à observer le monde autour d'eux avec plus d'attention. L’œil s'est fait plus perçant. Alors même qu'on donnait finalement au geste l'importance et la puissance d'évocation qu'il méritait, le devoir d'être mûrement réfléchis puis conçu avec la plus extrême délicatesse, n'était-il pas normal d'accorder au regard, seul capable de percevoir le geste sacré, geste devenu le principal vecteur de communication, une pareille attention ? Nous avons travaillé sur le regard. Nous l'avons fait plus analytique, plus sensible, plus précis. Plus apte à capter les infimes variations, moins troublé. C'est devenu un regard clair, moins prompt à s'égarer, capable de se fixer sans pour autant se diluer.
Ainsi, l'ère du silence est devenu également celle du regard. Celle du regard et celle du geste. Ils ont créé ensemble un nouveau monde.

Néanmoins, l'ancien monde n'est pas mort sans maudire. Il a cherché l'ordre vicieux du cycle, la fausse solution de la répétition. Il n'a laissé tourné la roue que dans l'espoir que tout se répète à nouveau, un jour. Quelles auraient été les conséquences si il était parvenu à rendre une fois de plus l'histoire cyclique ? A provoqué le déclin de l'ère muette ? Le bruit se serait répandu telle une épidémie. Il aurait suffit d'une graine pour donner naissance à un jardin, et d'un jardin se serait élancé la forêt du capharnaüm.
C'est en cela que le regard nous a sauvé. Quand il s'est infiltré dans le moindre recoin de nos rues, qu'il s'est mis à quadriller le moindre mètre carré d'espace publique, puis quand il s'est posé dans chaque angle de chaque pièce de chaque maison, partout. Les caméras nous ont sauvé. Elles nous ont assuré que, nul part, le bruit ne pourrait de nouveau germer puis s'étendre. Pas sans que cela soit su.

Et ce sont ces mêmes œils de verre qui nous ont assuré la légitimité du roi. Le roi Uliel, couronné dans son sommeil par une salamandre. Comme le voulurent les poètes des siècles passées et la providence qui, cette nuit là, réalisa leur vision. Leur prophétie peut-être ?

Puisse le roi du silence régner longtemps, paisiblement, avec sagesse. Quand bien même le monde pourrait entrer bientôt dans une nouvelle ère. A ce qu'on raconte, l'afflux excessif d'informations visuelles serait sûrement nocif...
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