Le Pare-tempêtes
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Silver Phoenix
Silver Phoenix
Messages : 134
Date d'inscription : 27/08/2018
Age : 26

CC : Morte armée Empty CC : Morte armée

Sam 15 Sep 2018 - 15:43
Son temps était venu...

Michael nettoyait son fusil d'une main tremblante. Son estomac était sauvagement attaquée par une angoisse barbare, d'une puissance colossale. Des milliards de pensées s'entrechoquaient dans sa jeune tête. Ses yeux semblaient luire de mélancolie, alors qu'un féroce mélange de colère et de peur dévorait ses entrailles.

Pourtant, Michael tentait de ne rien laisser paraître. C'était son devoir de participer à cette guerre absurde, alors que l'armée ennemie demeurait supérieure en nombre et possédait une bien meilleure technologie de combat. Des avions flambants neufs, des bombes incendiaires pouvant détruire des villes entières, des soldats surentraînés...

Michael le savait. Il était déjà mort. Son armée était déjà morte.

Il désirait fuir. Fuir cette guerre meurtrière et inutile. Fuir sa mort. Mais son destin était inéluctable. Peu importe son choix, la mort le guettait. Et si ce n'était pas la mort, ce serait une souffrance éternelle... « déshonnorer » sa patrie le conduirait à vivre l'enfer. Ce patriotisme dégoulinant le dégoûtait jusqu'à la nausée. Et pourtant, il se trouvait ici, dans cette armée qu'il avait toujours méprisé.

Michael se leva, prit son fusil à deux mains, et le rangea sur son dos voûté. Un soupir de désespoir s'échappa de ses narines. Il avait peu de temps avant de partir à la mort. Le jeune homme se mordit avec force la lèvre inférieure, puis claqua des dents. Si seulement il pouvait partir... Si seulement...

Une idée fulgurante lui vint tout à coup à l'esprit. Il devait écrire. Ecrire une lettre ouverte, anonyme, où il cracherait toute sa haine et sa rancoeur envers l'armée, la guerre, la mort, et même les humains en général. Lui qui avait toujours oeuvré pour la paix, pour que les Hommes puissent se comprendre, il n'avait désormais plus qu'un profond dégoût pour sa propre espèce.

Michael reposa lentement son fusil dans un coin de la pièce, puis prit du papier et un crayon. Il se dirigea vers une chaise, s'installa dessus et commença à écrire.

« Je suis mort. Cette guerre m'aura tué d'ici quelque heures. Je suis juste dégoûté de ma propre vie. J'ai échoué. Je voulais tellement que la paix soit vécue par tous au quotidien. Mais ce combat est vain. Cette guerre est vaine. Tout est vain désormais. Car je suis mort.

Mon armée, je la méprise. Elle est morte, elle aussi. Tout autant que moi. Tous les soldats que j'ai connus, les téméraires, les angoissés, les loyaux, les sadiques meurtriers, seront tués par la balle, les maladies et les obus. Cette institution si sacrée nous envoie à la mort. Je suis mort. Je suis mort. Je n'arrête pas d'y penser. Je suis mort.

Tout ça pour quoi en fin de compte ? Le pouvoir ? L'argent ? Le patriotisme ? La haine de l'autre ? Je n'en sais rien du tout...

Ce que j'écris paraît naïf et décousu, mais les mots me manquent pour m'exprimer... ».

Michael ne sut quoi écrire d'autre. En effet, les mots lui manquaient. Il ne connaissait pas les aboutissements de cette guerre ou le contexte géopolitique de son époque. Il n'était qu'un jeune homme pour lequel le monde s'était effondré.

Il garda le papier sur lui, reprit son arme et marcha sans assurance vers la porte. Il plaça sa main sur la poignée et actionna le mécanisme en l'abaissant. La lumière du soleil pénétra dans la pièce. Quelques soldats armés se trouvaient à quelques mètres de la porte. Michael les voyait déjà en tant que cadavres debout sur leurs jambes décomposés, le visage et les membres quasiment squelettiques. Il ne pouvait pas les imaginer vivants une seule seconde. Il se voyait lui-même la chair pourrissante, dévoré par des vers.

Les soldats ne prirent pas la peine de lui jeter un regard. Mais cela lui était complètement égal. Tous semblaient concentrés, les sourcils froncés et les lèvres pincées. Concentrés, mais non assurés.

Michael était sur le point de craquer. Une petite larme perlait dans son œil droit. Il était définitivement mort.

«Garde-à-vous ! retentit soudainement une voix vive et puissante.»

Michael et les autres soldats se redressèrent d'un geste, les membres serrés et contractés. Le sergent était arrivé.

«Suivez-moi ! Hurla-t-il.»

Michael lâcha discrètement un soupir. Il n'avait plus que quelques heures. Les militaires marchèrent vers des camions vert sombre très larges. Ils devaient être parqués là-dedans pour ensuite être envoyés dans le champ de bataille. Michael monta dans l'un de ses camions, dissimulant son angoisse et sa haine. Il abhorrait vraiment la guerre.

Le voilà, parti dans ces camions en guise de fourgons mortuaires.
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