Le Pare-tempêtes
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.
Le Deal du moment : -21%
LEGO® Icons 10329 Les Plantes Miniatures, ...
Voir le deal
39.59 €

Aller en bas
Leer
Leer
Messages : 171
Date d'inscription : 16/08/2018

CC N°39 Musique Empty CC N°39 Musique

Sam 16 Nov 2019 - 21:36
Leer
Leer
Messages : 171
Date d'inscription : 16/08/2018

CC N°39 Musique Empty Re: CC N°39 Musique

Sam 16 Nov 2019 - 23:04
La pluie caressait les vitres de ses longs doigts.
Malia baissa les cils.
Tout son corps s'alanguissait, mille rouages tournant au ralenti. L'air froid soulevait les poils de ses bras. Ses lèvres serrées sur un sourire.
Le bruit d'une porte qui laissait passer l'homme Papa, plus loin dans la maison.
Il sortait les poubelles : le bruit de ses pas.
Elle pensa à son menton mal rasé.
Il sortait, et l'air froid faisait dresser les poils de sa nuque. Lui faisait respirer un halo blanc.
Ses bras chargés par les ordures, pesant sur ses muscles, frissemant au creux de son poing.
Il mettait toujours du parfum le matin.
Cologne.
Silver Phoenix
Silver Phoenix
Messages : 134
Date d'inscription : 27/08/2018
Age : 26

CC N°39 Musique Empty Re: CC N°39 Musique

Sam 16 Nov 2019 - 23:20
Matthieu lui avait dit que tout se passerait bien.

Il lui avait dit qu'ici, il serait accepté, accueilli comme un membre de leur famille.

Il lui avait aussi dit qu'il ne devrait pas avoir peur de chanter devant eux.

Que doit-il chanter, alors ? Il ne chante que des trucs déprimants, misérable dans les stations de métro (ou les abysses de Paris, comme il aime tant les surnommer) avec sa guitare sèche aux cordes rouillées, à peine accordée. Il ne sait même pas si bien jouer que cela !

Il est devant des virtuoses, un sourire lumineux incurvant si fièrement leurs lèvres, au look excentrique et coloré ou alors classe et sobre, de belles chemises bien taillées sans le moindre pli, des pantalons sans trou, des robes cintrées mettant en valeur des courbes plus ou moins généreuses... Il est dans un putain de club de jazz !

Et lui ? Des cernes avalant goûlument des yeux ternis de lassitude et de mélancolie, des cheveux sales sous un bonnet bon marché, une barbe irrégulière pas entretenue depuis longtemps épousant une mâchoire anguleuse et balafrée, des vêtements crasseux le protégeant vaguement du froid... Un anonyme qui n'a même pas de toit où s'abriter.

Et par-dessus le marché, aucune connaissance en jazz.

Enfin, si... Peut-être cette chanson, qui le hante depuis des années...

A-t-il le moral de la chanter, surtout vue son humeur actuelle ?

Il inspire à plein poumon cet air parfumé de café et de whiskey. C'est vrai. Il a bien envie de chanter. C'est simplement intimidant de s'ouvrir devant ces jazzmen qui semblent avoir tant de joie de vivre. Avec son look pitoyable et cette chanson en particulier, il ne peut qu'espérer ne pas leur donner envie de se foutre une balle en pleine tête !

Matthieu lui lance un regard sympathique.

"Je te vois pas très confiant, Romain."

Romain. Ça lui fait encore bizarre qu'on l'appelle par son nom. Il ne peut s'empêcher de sentir quelque chose se diffuser dans sa poitrine, sans savoir ce que c'est.

"Je ne suis pas à ma place. C'est tellement plein de vie, ici." répond-il.

Matthieu semble réprimer un sourire.

"Le jazz, ce n'est pas toujours joyeux. Tu ne peux pas savoir combien de fois j'ai pleuré, ici."

Matthieu boit rapidement deux gorgées de whiskey.

"On peut aussi venir dans ce club pour déprimer un bon coup."

Romain affiche alors à son tour un sourire, plus sardonique.

"Au moins un truc que j'sais faire."

Sur ces mots, il se lève, sa guitare à la main, en direction de la petite scène.

Une imposante batterie. Une haute contrebasse. Un grand piano à queue noir. Des microphones. Des amplificateurs. Des câbles jonchant le sol. Des rideaux d'un flamboyant écarlate.

Les parfums du bois laqué, de l'acier, du velours, qui se mêlent à ceux de l'alcool fort et du café chaud. Les parfums des cordes rouillées et du vieux bois de sa propre guitare qui les embaument alors qu'il l'installe bien contre lui.

La sangle de sa guitare tire un peu sur son épaule comme pour bien le garder sur scène.

Il ajuste le microphone à sa bouche, les doigts crispés et la mâchoire serrée. Seule sa lèvre inférieure empêche ses dents de claquer entre elles.

Il regarde alors devant lui. Sous ces cascades de couleurs douces, tous les jazzmen et jazzwomen le regardent en retour, en se taisant, sûrement prêts à l'écouter. Sondant un à un leur visage, il ne remarque aucune trace de mépris. Ou de pitié. Ou de dégoût. Ils ont même l'air intrigués.

Cette sensation dans sa poitrine se renforce. Il ne sait toujours pas ce que c'est, mais peu importe.

Matthieu porte une dernière fois la boisson ambrée à ses lèvres, pose délicatement le verre sur la table immaculée dans un bruit feutré, et lui sourit.

Romain lâche un soupir bref en guise d'une réponse silencieuse, avant de prendre quelques inspirations pour se concentrer, s'assurant que sa guitare est correctement accordée.

Mi. La. Ré. Sol. Si. Mi.

Bien.

Une ultime inspiration...

Et un arpège, métallique, sombre, ténébreux, vole pour pénétrer les oreilles des spectateurs.

Un accord, lui aussi sombrement coloré.

Et une voix. Grave, éraillée, rauque, presque douloureuse.

Les paroles sont en anglais. Ils vont probablement tout comprendre, mais ils vont surtout le ressentir, se dit distraitement Romain.

Des paroles glauques, qui alourdissent l'ambiance déjà morbide installée par les premières notes de sa guitare.

Romain se sent alors comme parler à la Mort elle-même. Cette chanson, qu'il avait écouté il y a bien des années, le hante encore plus depuis qu'il est à la rue, surtout ces dernières semaines. Il ne sait plus pourquoi il a choisi d'arranger cette chanson à la base, mais elle semble aujourd'hui lui parler, le transcender, même.

Il laisse bien chaque mot peser, les notes de sa guitare dansant avec sa voix. Et les silences pèsent encore plus lourd.

Romain sent à peine ses doigts s'étirer et s'appuyer. Juste les sons plaintifs et macabres de sa vieille guitare. Et les souvenirs lancinants qu'évoque cette maudite chanson.

Romain a mal. Et, emporté par cette douleur, il se fiche désormais de faire déprimer son public. Il regrettera plus tard.



(inachevé)


Dernière édition par Silver Phoenix le Dim 24 Nov 2019 - 23:26, édité 1 fois
Silenuse
Silenuse
Messages : 8
Date d'inscription : 01/10/2018

CC N°39 Musique Empty Re: CC N°39 Musique

Dim 17 Nov 2019 - 12:26
LE SAMEDI SOIR, ABANDONNE
DANS LES RUES OBSCURES DE
CERGY






Retenir son souffle,
le regard perdu,
cherchant et évitant -
ce paradoxe inattendu ! -
un éclat dans les yeux des autres.
Retenir son souffle
jusqu'à ce que,
peu à peu,
les sentiments,
s'élident.


17/11/2019

Je marque le temps
pour faire croire
qu'on peut l'arrêter.

Contenu sponsorisé

CC N°39 Musique Empty Re: CC N°39 Musique

Revenir en haut
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum