Le Pare-tempêtes
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En l'épouvantable jour du frisson Empty En l'épouvantable jour du frisson

Dim 26 Avr 2020 - 21:27
Uiuiuiuiuiui
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En l'épouvantable jour du frisson Empty Re: En l'épouvantable jour du frisson

Dim 26 Avr 2020 - 22:43
Je l'ai retrouvé en premier sur une boîte noire d'avion. L'une de mes marottes est d'écouter ces enregistrements.
(présence qui prend le contrôle du pilote et le force à agir d'une manière insensée, aboutit/mène au crash de l'avion)
Ca m'a marqué, d'abord parce que ça fait peur, encore plus avec le son des enregistrements de boîte noire (c'est grésillant comme une radio cassée), mais surtout parce que ça n'a aucun sens... Quand on sait tout ce que les pilotes passent comme tests moteurs et psychologiques avant de pouvoir monter dans un avion. Ca donne envie de dire qu'il a claqué, surmenage, ou insomnie... Ce serait rassurant. Mais c'est invraisemblable. J'étais vraiment confus, là-dessus. Je ne comprenais pas. J'ai regardé plein de films là-dessus, et de vidéos sur Youtube, parce que c'est un peu ma passion, et à aucun moment j'ai vu un autre témoignage comme ça.

La fois suivante où j'en ai entendu parler, c'était une année après environ, dans le procès verbal d'une affaire que j'étudiais en droit. Un homme accusé de meurtre, relativement sordide, il avait cogné sa femme au poing avant de l'achever à grands coups de je ne sais plus quel objet.
Lors de sa première audience, il a tout avoué immédiatement (je crois que c'était lui qui avait alerté la police en premier) il plaidait n'avoir eu aucun contrôle de ses actions et ne pas comprendre... Bon, ça arrive, mais ce qui m'a rappelé le premier cas c'est qu'au bout de quelques séances, son avocat a plaidé la folie et le type ne répondait pas, ou protestait carrément contre son avocat, ce qui est contraire à toute stratégie. Normalement les types qui plaident le manque de contrôle cherchent à réduire leur peine et suivent les conseils.
Les policiers qui ont reçu son appel sont venus témoigner aussi, ils ont confirmé que lorsqu'il a prévenu, il était complètement paniqué. Il parlait du meurtre et de tout ce qu'on « lui avait fait faire », sans pouvoir expliquer qui lui avait « fait faire ». Au procès, lorsqu'on reprend cela, il commence à parler d'une puissance suprême dans sa tête et de comment il l'a senti s'installer peu avant que sa femme revienne du travail... il se coupe au bout de quelques échanges avec le juge peu crédule. Après, il se renferme et n'en parle pas. Je me suis demandé ce que ça aurait donné s'il avait été pilote d'avion... Peut-être pareil ou à peu près.

Et puis, il y a eu les petites annonces. Beaucoup trop de petites annonces. Et la TV a commencé à en parler.
Silver Phoenix
Silver Phoenix
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En l'épouvantable jour du frisson Empty Re: En l'épouvantable jour du frisson

Dim 26 Avr 2020 - 22:47
Épuisé.

Totalement.

C'est fini.

C'est bel et bien. Fini.

Il se laisse simplement tomber sur le sol, frotter son dos contre le mur de pierre. Ses mains calleuses serrent sa tête, comme tentant de la broyer. Ou au moins calmer toutes les pensées transperçant son crâne de part en part, résonnant plus fort que si elles avaient été hurlées. Inoculant d'un innommable effroi ses membres jusqu'à ses os.

Ses yeux sont humides, écarquillés comme prêts à être éjecté des orbites.

Sa gorge est sèche, irritée comme raclée sur du papier de verre.

Son sang est glacé, battant contre ses tempes comme une myriade de gifles.

Ses jambes sont lourdes, tiraillant comme sur le point d'être écartelées.

Et ce n'est rien comparé à cette sensation d'organes internes complètement retournés, écrasés comme dans un étau. A ce cœur, pulsant frénétiquement contre sa poitrine, comme voulant s'échapper du corps qu'il faisait fonctionner.

Et c'est ainsi qu'il va utiliser ses dernières forces.

A se morfondre lamentablement dans le désespoir. A attendre que tout se finisse enfin.

Les déferlantes d'adrénaline palpitant dans ses veines ne suffisent même plus pour le faire bouger.

Il pouvait aller où, de toute façon ?

Ça fait combien de temps qu'il vagabonde ici ? Essayant de fuir son destin pourtant, il le sait désormais, inéluctable ?

Il allait...

Il allait !...

Son souffle erratique brûle ses poumons, les gonfle puis les vide à une vitesse à la limite du soutenable. Ses côtes vont peut-être se casser, percer sa peau de leur pointe aiguisée, à force d'être malmenées comme ça. Mais il s'en fichait complètement.

On allait le trouver d'une seconde à l'autre.

Il n'en peut plus.

Ses oreilles bourdonnent, mais il entend des bruits. D'indescriptibles bruits. Pénétrant son crâne. Râpant ses tympans.

Un énième frisson parcourt son échine.

Il a chaud. Froid.

Tremblant. Paralysé.

Les bruits sont plus forts. Plus proches.

Le vacarme naissant explose maintenant dans son crâne.

Il allait !...

Il... allait...

Il...

allait...

être...
Pantouffe
Pantouffe
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En l'épouvantable jour du frisson Empty Re: En l'épouvantable jour du frisson

Dim 26 Avr 2020 - 22:54
L'ombre blanche traversa la cuisine dans un froissement de robe qui faisait aux oreilles comme le crissement désagréable d'une feuille de papier de verre. Quelques notes d'une chanson ronronné derrière des lèvres closes suivirent l'arabesque de son mouvement gracieux tandis qu'elle se penchait.
Avec un sourire de sucre filé où se suspendaient ostensiblement toutes les perles enchâssées à ses gencives fondantes, Madame sortit les cookies délicatement modelés du four, grande gueule d'acier ronronnant pardessus le tic-tac discret d'une horloge enluminées de sculptures. Fleurs. Oiseaux. Chérubins aux fesses tendres.
Entre les mains gantées de Madame, une petite armada de délicieux monticules encore tout palpitant de chaleur fit son apparition, groupement de dômes brunies enrubannés de fumée tels des cadeaux de Noël. Ils avaient la plus jolie des apparences, propre à égayer les papille dans un feu d'artifice d'anticipation gourmande. Leur forme était parfaite, presque plastique dans sa finesse- un délice pour enfants, tout droit sorti d'une dinette. Leur galbe savoureux avait été réalisé avec tant d'artistique application qu'il aurait fait saliver des silex jusqu'à les rendre impropre à faire du feu. Constellés de grosses pépites de chocolat -au lait, évidemment-, ils respiraient doucement sur la plaque chauffante dans un frémissement organique qui agitait leur pâte brune, moelleuse, d'aussi exquise texture que celle d'un ventre duveteux d'oisillon, recueillis tout au sortir de l’œuf- et plus fameux que n'importe quelle petite poche d'entrailles au touché de satin, à n'en pas douter.
Dans la cuisine joliment carrelée de différentes teintes d'ocre orangée qui créaient comme un havre estivale où les ustensiles rutilants semblaient se faire des clins d’œils d'un présentoir à l'autre, l'exhalaison des biscuits traîna un temps durant en volutes paresseuses. Les impalpables arabesques emplirent l'atmosphère d'une délicieuse odeur de sucre. Une brise aussi légère que salvatrice qui vint supplanter les relents de javel qui s’accrochaient encore à chaque recoin de la cuisine, caresse flatteuse à la narine.

Assise droite sur sa chaise, le regarde fixe et les ongles plantés au fond de ses paumes, Lüe n'eut qu'encore un peu plus envie de vomir à la vision de la plaque où s'étalaient les cookies frissonnants, impeccablement alignés sur le papier aluminium qui ne faisait pas un plis. Véritable miroir dans lequel les biscuits auraient pu se mirer à loisir s'ils avaient seulement eu des yeux pour s'admirer avec adoration- ce qu'ils n'auraient probablement pas manqué de faire avant d'être mangés, tant ils étaient jolis. N'importe qui aurait été hypnotisé. Lüe, pour sa part, n'aurait pour rien au monde voulu leur faire l'honneur d'un coup de dent. Un hurlement animal tournait dans sa gorge comme un chat noir à la fourrure hérissée, tout prêt de sortir en un déferlement de violence.

Elle abhorrait les mains trop blanches qui les avait façonné avec des gestes doux- les mains d'albâtre de la ménagère. De la dame haute aux dents de céramique et aux cheveux tissés avec des coulées de neige. Toute entière faîte d'un seul bloc de pierre immaculée, puis coiffée d'une tignasse chenue artistiquement calamistrée... Elle était, avec l'argent précoce de sa chevelure, plus blonde à sa manière que la plus blonde des femmes. Quant à ses yeux, ils avaient l'étrange couleur d'une neige fondue dont la disparition aurait révélé les dernières traces d'un meurtre ; une teinte grisâtre qui se colorait parfois, à certaines lumières, sous certains angles, d'une nuance délicatement rosée. Ce qui aurait pu sembler bizarre chez une autre gagnait néanmoins chez elle une fadeur très froide. Quoique étrangement délavée, la ménagère restait semblable à une figure toute droit sorti d'un magazine, existence figée sur du papier glacé auquel un sortilège avait donné la vie.
Dans son tablier à fleurs, elle avait tout de la parfaite cuisinière, et le sourire mielleux qui étincelait sur son visage blafard ne parvenait guère qu'à lui faire une mine plus mortifère encore. Il y avait dans la lourdeur de ses paupières comme l'ombre d'un cimetière, mille rêves assassinés dont les cadavres croulaient sous le poids de petites pilules blanches avalées pour appâter chaque soir un sommeil débarrassé de présences oniriques ; dans le brouillard lardé d'aurore de ses iris, l'écho presque visible d'un cri silencieux qui rebondissait indéfiniment entre les parois de son crâne. Quelque chose chez cette femme était mort, et dans son éclatante absence, elle semblait avoir trouvé la paix. On avait même fleurit la tombe de son visage d'une rose flamboyante- bouche éclose en large fleur de feu, dernier hommage à une âme envolée qui n'avait laissé derrière elle qu'une carcasse livide. L'écarlate incongru de ces lèvres fardées lui donnait l'air d'un vampire fraîchement réhydraté. Lüe n'aurait été pas été surprise d’apercevoir deux petits crocs d'ivoire plantée dans ses gencives, mais elle avait eu tout loisir d'observer l'intérieur de cette bouche au long de l'interminable défilée de sourires qu'on lui avait servi. On y trouvait rien d'autre que des quenottes de nacre parfaitement alignées.

Si elle n'avait pas la canine perforante d'une suceuse de sang, Madame possédait néanmoins bel et bien un pouvoir proche du surnaturel. Elle avait du vampire la puissance hypnotique, un don occulte de fascination. Il se dégageait d'elle une langueur pathologique et communicative qui créait dans ses parages une épaisseur fangeuse. S'il n'y avait rien eu de plus, Lüe aurait peut-être était en mesure de supporter sa présence en ne lui opposant que son indifférence. Mais il ne s'agissait pas d'une anodine mollesse ; c'était une apathie heureuse, macabre, qui s'était nourrie des contraintes et des acceptations. C'était une sérénité de victime bienheureuse née de l’abdication. De l'échec embrassé à pleine bouche, saveurs putrides coulant sur les papilles. Un peu plus de néant creusé dans sa poitrine à chaque bataille perdue, à chaque gorgée de fiel, à chaque once grignotée de son indépendance et de sa dignité. C'était ça, dans son œil pâle, c'était ça dans chacune de ses risettes fondantes... On pouvait ressentir la présence de tous ces renoncements, juste là, dans l'abîme qui frémissait à l'envers de sa peau. Une craquelure sur l'âme, un frémissement dans le sirop de ses yeux. Un roncier replié tout au bord de la bouche, mis à bas, là, dans le moelleux de la langue. Quelques épines et un brasier bien cachés sous du miel, du velours et de la porcelaine. Tout un silencieux cataclysme, toute une tragédie noyée dans la langueur.
Et il y avait dans cette douceur mortifère l'ombre d'une connivence, comme une promesse susurrée à chaque regard mort que lui adressait la dame de papier glace.

Ton tour viendra ma biche.

Lüe pouvait presque l'entendre à chaque démonstration de grâce mécanique, à chaque indolente exhibition d'une qualité domestique érigée en pilier de l'implacable -et respectable, n'est-ce pas ?- art ménager dont on lui vantait silencieusement les mérites à coups de cuisine équipée, de propreté aseptisée et de préparation de dîner appliquée. Quelque chose le lui soufflait au creux de l'oreille dés que la ménagère lui coulait un regard, dés qu'elle faisait d'un simple geste une forme vicieuse de démonstration pédagogique, dés que par un mouvement tout empreint d'élégance elle lui martelait sur la rétine le carcan d'une féminité biberonnée aux idéaux bourgeois. Il y avait des clins d’œils dans chacune de ses oreillardes, une sympathie menaçante qui roulait sous sa langue quand elle lui adressait la parole avec sa voix chantante. Madame dansait impeccablement bien sa valse solitaire, tournoyant paisiblement dans sa boîte à musique. Elle était à son aise dans cette cage en forme de maison. Et son aura lénifiante de femme au foyer épanouie glaçait le sang de Lüe.

Madame s'approcha d'elle se départir de son sourire paisible, comme peint sur la faïence glacée de son visage. La lumière du contre jour l'auréola d'une clarté estivale qui ne parvint pas à faire ressortir un seul cheveux indompté ni fil trop long en dehors de la forme parfaitement manufacturée de son anatomie. A chaque pas, la lumière parut devenir plus blanche et perdre de son miel. A chaque centimètre gagné sur la distance qui les séparait, Madame sembla devenir plus haute. Lüe eut l'impression de voir venir sur elle l'approche inexorable d'un chevalier prêt pour la guerre. Ce plat de cookies était son arme. Ce tablier aux imprimés de tournesols et de pastèques bien rondes composait son armure. Et les yeux grisâtres qu'elle gardait implacablement fixés sur elle disaient tout de ces vérités grimées. Sous leurs paupières épaisses, ils cillaient aussi peu que les orbes d'un rapace. Quand Madame se pencha sur elle dans un long roulement de vertèbres, Lüe mua le rictus qui lui venait aux lèvres en une sourire aussi métallique que le fil d'un couteau. L'acier contre la céramique.

- Vas-y lui dit Madame de sa douce voix de gorge, prends un tant qu'ils sont encore chauds.

- Sans façons. Je m'en voudrais d'en priver votre très cher mari.

- Ne fais pas l'imbécile ! répliqua Madame avec un rire rempli de clochettes, se redressant sans pour autant éloigner la plaque de cuisson de son visage. Le rôtie est pour lui, mais ces petites douceurs ne sont pas à son goût. Il préfère le jus de viande à la fleur d'oranger... Et il n'a pas besoin d'autre désert que moi, ajouta t'elle en clignant d'un oeil pétillant d'une vague étincellel de langueur.

Cette fois Lüe ne peut empêcher le dégoût de suinter au travers du masque qu'elle s'était forgée. Quelque chose étincela dans son œil et frémit sur sa lèvre. La Ménagère n'eut aucun mal à le percevoir. Sa réaction parut l'amuser. Elle se fendit d'une moue moqueuse et eut un regard qui se voulait maternelle ; Lüe n'y vit rien de plus que la neige battant à des carreaux.

- Oh ! Allons, chérie ! Toi aussi tu devras bien te faire à l'idée d'écarter les jambes pour ton homme un beau jour. Il y a là-bas une petite fleur qui n'attend que d'être butinée, n'est-ce pas ?

Les yeux de Madame se posèrent entre ses cuisses. Elle put presque en sentir la piqure, le pincement, la brève auscultation clinique. Le chat noir se mit à gonfler dans sa gorge.

Il faudra bien t'y résoudre pour espérer le garder surenchérit-elle avec un air de bienveillance parentale en prenant place de l'autre côté de la petite table formica, posant finalement la plaque entre elles deux. Comment comptes-tu réduire le nombre de ses maîtresses dans le cas contraire ? De quelle façon pourras tu prétendre le mériter plus qu'une autre si tu ne le cajoles pas ? Un joli minois, ça ne fait pas tout ma biche !
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