- Leer
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Boum bébé ! Thème image.
Dim 21 Nov 2021 - 21:58
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- Malnir
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Re: Boum bébé ! Thème image.
Dim 21 Nov 2021 - 23:08
Il y a, à quelques distance dans la campagne, une falaise bordée d’un ruisseau asséché. Quand la nuit tombe, la forêt alentour expire une brume grise et cotonneuse, comme des lambeaux de laine sale. On dit que la colline est truffée de tunnels, qui ont été creusés à l’époque où il y avait encore de l’or dans les parages. Je passe souvent non loin quand je me promène, le weekend. Souvent, je trouve l’endroit si triste que je m’en éloigne le plus vite possible. Allez savoir pourquoi. Ces herbes sèches, ces buissons rachitiques, peut-être. Il y a quelque chose de la friche là dedans qui me met terriblement mal à l’aise.
Alors je presse le pas, je me précipite vers les sentiers plus fréquentés, j’arrive à ma voiture et je rentre à toute allure jusqu’à chez moi. J’essaie de me dire que cette impression pénible n’est pas fondée, que je joue à me faire peur. J’essaie vraiment. Et parfois j’arrive à me convaincre. Puis la pluie arrive, couvre le pays de sa traîne glauque et je pense, en regardant par la fenêtre, que cette falaise a quand même quelque chose de profondément malsain. Je l’aperçois entre les cimes des arbres. J’y aperçois parfois des silhouettes à son sommet, de formes filiformes. Alors je me recule pour échapper à cette vision. Je ferme les rideaux, j’allume toute mes lampes pour ne laisser aucune ombre. Je me sens mal, je me sens triste, je prends un thé, deux thé, un café, deux café, je le noie dans le sucre. Je mange des barres de céréale, des parts de cake. Rien ne gomme mon malaise.
Je vois l’heure filer. 16 heure, 17 heure, le soir tombe, 18h, la nuit arrive, 19h, 20h. Je mange à nouveau, et l’angoisse monte dans ma poitrine. Je m’installe dans mon fauteuil, je lis un livre, je l’abandonne. Je finis par voir l’heure filer, filer et filer. Je me lève, je regarde dans le vide. Oh, on est dimanche, demain lundi. La semaine qui reprend, où est passé mon weekend ? Et cette falaise, que je sens même au travers des rideaux.
Alors je presse le pas, je me précipite vers les sentiers plus fréquentés, j’arrive à ma voiture et je rentre à toute allure jusqu’à chez moi. J’essaie de me dire que cette impression pénible n’est pas fondée, que je joue à me faire peur. J’essaie vraiment. Et parfois j’arrive à me convaincre. Puis la pluie arrive, couvre le pays de sa traîne glauque et je pense, en regardant par la fenêtre, que cette falaise a quand même quelque chose de profondément malsain. Je l’aperçois entre les cimes des arbres. J’y aperçois parfois des silhouettes à son sommet, de formes filiformes. Alors je me recule pour échapper à cette vision. Je ferme les rideaux, j’allume toute mes lampes pour ne laisser aucune ombre. Je me sens mal, je me sens triste, je prends un thé, deux thé, un café, deux café, je le noie dans le sucre. Je mange des barres de céréale, des parts de cake. Rien ne gomme mon malaise.
Je vois l’heure filer. 16 heure, 17 heure, le soir tombe, 18h, la nuit arrive, 19h, 20h. Je mange à nouveau, et l’angoisse monte dans ma poitrine. Je m’installe dans mon fauteuil, je lis un livre, je l’abandonne. Je finis par voir l’heure filer, filer et filer. Je me lève, je regarde dans le vide. Oh, on est dimanche, demain lundi. La semaine qui reprend, où est passé mon weekend ? Et cette falaise, que je sens même au travers des rideaux.
- SolalCendre
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Re: Boum bébé ! Thème image.
Dim 21 Nov 2021 - 23:09
Il n'y a rien, à Pont-Pauvre. Rien d'autre que des vieux qui font craquer leurs carcasses sur les bancs devant l'église. Une église pleine de courants d'air que le curé s'efforce de colmater par des messes où ne viennent plus que les femmes. Et des femmes encore ne viennent que les veuves et les oisives, armées de leur tricot contre la logorrhée du prêtre dont rien, pas même le froid, pas même les cris des chats-huants les soirs d'hiver, ne semble entamer l'enthousiasme. Les hommes ne viennent plus aux messes ni à confesse – ils gravellent ce mot en plaisanteries acerbes qui ne font plus rire que les enfants qui ne l'ont jamais entendue, et ceux-là se font de plus en plus rares.
Il n'y a rien à Pont-Pauvre, plus rien qu'un troquet hanté des trois mêmes soiffards, où l'on ne s'arrête plus sinon pour gratter, le temps d'attendre la calèche, la graisse figée sur les tables, de peur de passer pour un ivrogne soi aussi. Des paires d'yeux guettent par les fenêtres qui entre et sort de ce bar qu'on appelle communément, et non sans un frisson, la porte du diable. Le patron n'essuie plus les verres que quand on lui commande à boire, accoudé sur son bar, la tête dans une main, le visage écroulé d'être resté trop longtemps affalé dans la même pose, et il toise les rombières qui le méjugent en passant d'un œil torve et maussade.
Il n'y a rien à Pont-Pauvre qui se dise. Tout se tait et tout se sait. On commère dans le secret des boudoirs. Les enfants s'endorment sans histoire. On ne chante plus aux veillées, écourtées bien souvent par une main avare qui mouche la bougie sitôt le soleil tombé. On ne s'assoit plus, aux beaux temps d'été tout autour de l'île pour pêcher. On regarde, de chaque part du village, couler la rivière dont seul la variance du flux rythme la vie dans ce pays aux couleurs tièdes, au froid indécis, à la pluie chagrine.
Il y a un pont, un pont de pierre râblée qu'aucun homme et qu'aucune femme n'a jamais franchi. Personne ne l'a jamais interdit, pas même le prêtre, qui n'en a cure, mais on ne le passe pas, ce pont, car on n'en a pas besoin. Tous les champs sont sur l'île, on puise l'eau de la rivière, les saisons coulent si vite et si lentement qu'il passe volontiers un an sans qu'on ait senti le besoin d'aller dans l'ailleurs, comme disent les vieux sur les bancs. Un ailleurs tout de joncs et d'arbres lents, d'arbres morts et de marais. Un ailleurs si semblable à l'île qu'il ne réveille pas même dans le cœur des enfants la curiosité d'aller y voir.
Il y a douze enfants, à Pont-Pauvre. Trois ont les yeux si rapprochés, le menton si prognathe et la vue si mauvaise qu'on n'a rien pu leur apprendre d'autre que manier la houe et tenir le soc dans le sillage des chevaux. Six d'entre eux, collés à leur mère comme des puces, ont pris d'elles le même regard bas et mauvais de qui s'attend toujours à voir le pire sans jamais le voir venir. Deux garçons encore, les plus âgés, le menton déjà brun de jeune barbe, ne pensent qu'à fuir le regard cornu de leurs parents pour se caresser à l'ombre des roseaux. Il n'en reste qu'un, transparent comme une brume, que jamais on ne vit jouer avec personne et qui suivait les autres pourtant d'un pas traînant, à petite distance, qui les regardait commettre leurs méfaits ou s'ébattre dans le blé en herbe.
C'est en suivant ces deux garçons, un soir qu'ils lui avaient fait signe de les suivre, qu'il s'est perdu dans le brouillard. La purée de poix efface tout, avale le bruit des pas et les voix. Le chant de l'eau surgit de toute part, la rivière s'échappe de partout. C'est en cherchant son chemin dans le noir que le garçon traverse le pont sans s'en apercevoir. Il s'avance sur le sentier, entre les arbres, et ce n'est qu'une fois perdu dans le bois-même qu'il s'arrête. La rivière a disparu. Son chant a disparu. Autour de lui, les arbres grincent, les feuilles frisent, des pattes innombrables galopent dans l'obscurité. Alors le garçon court à perdre haleine, frappe furieusement de ses sabots le sentier gorgé d'eau. Une racine salope entrave sa cheville et l'étale dans la boue. Souillé, haletant, pleurant, il se relève. Une lueur apparaît dans la ténèbre. Droit devant lui, un lumignon immobile. Ami ou ennemi, l'enfant n'y pense pas, et il s'élance vers elle de toute la force de ses jambes maigrelettes.
Elle vacille devant lui, pendue à la branche basse d'un chêne. Elle éclaire, dans un halo blanchâtre, l'entrée d'une grotte juste devant lui. On a taillé dans l'entrée un linteau et des montants, tout comme une porte de chez lui, mais en pierre et d'un seul tenant. Il n'y a pas de lumière qui en sort. Seulement une haute forme sur le seuil. Une forme toute noire, drapée d'un long voile. De ce voile sortent deux mains que la lampe éclaire crue. Ces deux mains semblent flotter toutes seules dans le noir. L'enfant tressaille. Après un moment, il les voit, les bras, les épaules, les flancs et les jambes. Les pieds nus tâchés de terre. La forme avance, il recule. La tête passe le linteau trop bas. Derrière une chevelure noire longue et drue se dévoile, à la lampe chancelante, le visage d'une femme. D'une femme, l'enfant n'en est plus si sûr. Il y a quelque chose de plus dans ces traits qu'il n'arrive pas à définir. Dans le noir, deux yeux bruns profonds le regardent. Un sourire se dessine sur les lèvres.
« Alors, gamin, que fais-tu là ? Tu t'es perdu ?
L'enfant acquiesce. La sorcière sourit, penche la tête et saisit la lampe à la branche du chêne. Puis il met un genou en terre pour être à sa hauteur.
« Je te fais peur ?
L'enfant acquiesce de nouveau, sans conviction. Le visage est bon, le sourire tendre. Bien loin des lèvres crispées de son village. Il songe un instant que, s'il ne fait pas confiance à cette sorcière face à lui, il faudra retourner dans la forêt, risquer les bois, la boue, les animaux, le froid et la nuit.
« Est-ce que tu crois que je vais te manger ?
L'enfant fait non de la tête, avec tant de timidité que la sorcière rit de bon cœur. Il regarde l'enfant et lui chuchote :
« Je ne mange que des petites filles, rassure-toi. Maintenant, est-ce que tu veux entrer pour nettoyer toute cette boue sur ton visage et manger quelque chose de chaud ?
L'enfant opine, lentement. La sorcière se relève alors. Il tend la main au garçon qui la saisit. La peau est chaude et douce. L'enfant se sent bien. Au milieu de la nuit et de la peur, la main dans celle de la sorcière, l'enfant se sent bien.
Il n'y a rien à Pont-Pauvre, plus rien qu'un troquet hanté des trois mêmes soiffards, où l'on ne s'arrête plus sinon pour gratter, le temps d'attendre la calèche, la graisse figée sur les tables, de peur de passer pour un ivrogne soi aussi. Des paires d'yeux guettent par les fenêtres qui entre et sort de ce bar qu'on appelle communément, et non sans un frisson, la porte du diable. Le patron n'essuie plus les verres que quand on lui commande à boire, accoudé sur son bar, la tête dans une main, le visage écroulé d'être resté trop longtemps affalé dans la même pose, et il toise les rombières qui le méjugent en passant d'un œil torve et maussade.
Il n'y a rien à Pont-Pauvre qui se dise. Tout se tait et tout se sait. On commère dans le secret des boudoirs. Les enfants s'endorment sans histoire. On ne chante plus aux veillées, écourtées bien souvent par une main avare qui mouche la bougie sitôt le soleil tombé. On ne s'assoit plus, aux beaux temps d'été tout autour de l'île pour pêcher. On regarde, de chaque part du village, couler la rivière dont seul la variance du flux rythme la vie dans ce pays aux couleurs tièdes, au froid indécis, à la pluie chagrine.
Il y a un pont, un pont de pierre râblée qu'aucun homme et qu'aucune femme n'a jamais franchi. Personne ne l'a jamais interdit, pas même le prêtre, qui n'en a cure, mais on ne le passe pas, ce pont, car on n'en a pas besoin. Tous les champs sont sur l'île, on puise l'eau de la rivière, les saisons coulent si vite et si lentement qu'il passe volontiers un an sans qu'on ait senti le besoin d'aller dans l'ailleurs, comme disent les vieux sur les bancs. Un ailleurs tout de joncs et d'arbres lents, d'arbres morts et de marais. Un ailleurs si semblable à l'île qu'il ne réveille pas même dans le cœur des enfants la curiosité d'aller y voir.
Il y a douze enfants, à Pont-Pauvre. Trois ont les yeux si rapprochés, le menton si prognathe et la vue si mauvaise qu'on n'a rien pu leur apprendre d'autre que manier la houe et tenir le soc dans le sillage des chevaux. Six d'entre eux, collés à leur mère comme des puces, ont pris d'elles le même regard bas et mauvais de qui s'attend toujours à voir le pire sans jamais le voir venir. Deux garçons encore, les plus âgés, le menton déjà brun de jeune barbe, ne pensent qu'à fuir le regard cornu de leurs parents pour se caresser à l'ombre des roseaux. Il n'en reste qu'un, transparent comme une brume, que jamais on ne vit jouer avec personne et qui suivait les autres pourtant d'un pas traînant, à petite distance, qui les regardait commettre leurs méfaits ou s'ébattre dans le blé en herbe.
C'est en suivant ces deux garçons, un soir qu'ils lui avaient fait signe de les suivre, qu'il s'est perdu dans le brouillard. La purée de poix efface tout, avale le bruit des pas et les voix. Le chant de l'eau surgit de toute part, la rivière s'échappe de partout. C'est en cherchant son chemin dans le noir que le garçon traverse le pont sans s'en apercevoir. Il s'avance sur le sentier, entre les arbres, et ce n'est qu'une fois perdu dans le bois-même qu'il s'arrête. La rivière a disparu. Son chant a disparu. Autour de lui, les arbres grincent, les feuilles frisent, des pattes innombrables galopent dans l'obscurité. Alors le garçon court à perdre haleine, frappe furieusement de ses sabots le sentier gorgé d'eau. Une racine salope entrave sa cheville et l'étale dans la boue. Souillé, haletant, pleurant, il se relève. Une lueur apparaît dans la ténèbre. Droit devant lui, un lumignon immobile. Ami ou ennemi, l'enfant n'y pense pas, et il s'élance vers elle de toute la force de ses jambes maigrelettes.
Elle vacille devant lui, pendue à la branche basse d'un chêne. Elle éclaire, dans un halo blanchâtre, l'entrée d'une grotte juste devant lui. On a taillé dans l'entrée un linteau et des montants, tout comme une porte de chez lui, mais en pierre et d'un seul tenant. Il n'y a pas de lumière qui en sort. Seulement une haute forme sur le seuil. Une forme toute noire, drapée d'un long voile. De ce voile sortent deux mains que la lampe éclaire crue. Ces deux mains semblent flotter toutes seules dans le noir. L'enfant tressaille. Après un moment, il les voit, les bras, les épaules, les flancs et les jambes. Les pieds nus tâchés de terre. La forme avance, il recule. La tête passe le linteau trop bas. Derrière une chevelure noire longue et drue se dévoile, à la lampe chancelante, le visage d'une femme. D'une femme, l'enfant n'en est plus si sûr. Il y a quelque chose de plus dans ces traits qu'il n'arrive pas à définir. Dans le noir, deux yeux bruns profonds le regardent. Un sourire se dessine sur les lèvres.
« Alors, gamin, que fais-tu là ? Tu t'es perdu ?
L'enfant acquiesce. La sorcière sourit, penche la tête et saisit la lampe à la branche du chêne. Puis il met un genou en terre pour être à sa hauteur.
« Je te fais peur ?
L'enfant acquiesce de nouveau, sans conviction. Le visage est bon, le sourire tendre. Bien loin des lèvres crispées de son village. Il songe un instant que, s'il ne fait pas confiance à cette sorcière face à lui, il faudra retourner dans la forêt, risquer les bois, la boue, les animaux, le froid et la nuit.
« Est-ce que tu crois que je vais te manger ?
L'enfant fait non de la tête, avec tant de timidité que la sorcière rit de bon cœur. Il regarde l'enfant et lui chuchote :
« Je ne mange que des petites filles, rassure-toi. Maintenant, est-ce que tu veux entrer pour nettoyer toute cette boue sur ton visage et manger quelque chose de chaud ?
L'enfant opine, lentement. La sorcière se relève alors. Il tend la main au garçon qui la saisit. La peau est chaude et douce. L'enfant se sent bien. Au milieu de la nuit et de la peur, la main dans celle de la sorcière, l'enfant se sent bien.
- Silver Phoenix
- Messages : 139
Date d'inscription : 27/08/2018
Age : 26
Re: Boum bébé ! Thème image.
Dim 21 Nov 2021 - 23:18
Un râle, faible et rauque, vibre pitoyablement dans sa gorge. Le teint blafard, même comparé à celui de ses pairs, réfléchit la lumière alors que la nuit tombe avec douceur. C’est encore trop tôt pour sortir, le jour ne s’est pas totalement éclipsé.
Dal ne pointait plus le bout de son nez dehors depuis un moment. L’été arrive, les jours se rallongent, plus éclatants à chaque fois. Mince, même ses cheveux, pourtant d’un noir si profond, se sont éclaircis ! Et elle n’a clairement pas envie d’arranger ses boucles, emmêlées à force de s’avachir dans son lit en se contentant d’exister.
L’énergie. Le fil du temps. Perdus.
Ses lunettes sombres sont rabattues sur ses yeux. De même que sa capuche sur sa tête. Remparts de la lumière et, elle espère, dissimulatrices de sa fatigue. Elle couvrirait ses mains volontiers si elle ne suait pas autant à cet endroit ! Fichue chaleur nocturne !
Le parfum de l’herbe sèche taquine ses narines. Ses chaussures claquent sur la roche. Un seul besoin, pressant, viscéral ; se rafraîchir près du ruisseau.
Sa sortie de la grotte lui semble dramatique, comme si elle s’introduisait dans une pièce de théâtre. Du moins jusqu’à ce qu’elle trébuche sur de la terre. Ses ongles raclent la pierre à côté d’elle en se rattrapant. Dal soupire de sa maladresse. Mais elle n’en tient pas rigueur.
Elle baille. Cligne des yeux. Ses lunettes ne la protègent pas bien de l’inextinguible lumière crépusculaire. A moins que ça soit ses cernes qui la dérangent ? Mais imaginer le bruit du ruisseau s’écoulant tranquillement l’apaise. De toute façon, la voile de la nuit va tout recouvrir dans les prochaines minutes, accompagnée de quelques lueurs. Lunaires ou stellaires, temps que c’est supportable.
Dal ne pointait plus le bout de son nez dehors depuis un moment. L’été arrive, les jours se rallongent, plus éclatants à chaque fois. Mince, même ses cheveux, pourtant d’un noir si profond, se sont éclaircis ! Et elle n’a clairement pas envie d’arranger ses boucles, emmêlées à force de s’avachir dans son lit en se contentant d’exister.
L’énergie. Le fil du temps. Perdus.
Ses lunettes sombres sont rabattues sur ses yeux. De même que sa capuche sur sa tête. Remparts de la lumière et, elle espère, dissimulatrices de sa fatigue. Elle couvrirait ses mains volontiers si elle ne suait pas autant à cet endroit ! Fichue chaleur nocturne !
Le parfum de l’herbe sèche taquine ses narines. Ses chaussures claquent sur la roche. Un seul besoin, pressant, viscéral ; se rafraîchir près du ruisseau.
Sa sortie de la grotte lui semble dramatique, comme si elle s’introduisait dans une pièce de théâtre. Du moins jusqu’à ce qu’elle trébuche sur de la terre. Ses ongles raclent la pierre à côté d’elle en se rattrapant. Dal soupire de sa maladresse. Mais elle n’en tient pas rigueur.
Elle baille. Cligne des yeux. Ses lunettes ne la protègent pas bien de l’inextinguible lumière crépusculaire. A moins que ça soit ses cernes qui la dérangent ? Mais imaginer le bruit du ruisseau s’écoulant tranquillement l’apaise. De toute façon, la voile de la nuit va tout recouvrir dans les prochaines minutes, accompagnée de quelques lueurs. Lunaires ou stellaires, temps que c’est supportable.
- SolalCendre
- Messages : 20
Date d'inscription : 16/05/2021
Re: Boum bébé ! Thème image.
Dim 21 Nov 2021 - 23:51
- Solal:
Malnir - C'est drôle de voir des éléments de modernité dans tes récits, que je connais plus médiévaux ou dans des temps inconnus Ca commence avec le mot "weekend", qui m'a fait sourire. J'ai beaucoup aimé le fait que tu ne fais jamais allusion à l'image mais qu'on en ressente l'influence. Elle baigne ton récit, l'ambiance est réussie. J'ai vraiment ressenti ce même frisson acide quand je quitte en pressant le pas un endroit qui ne m'inspire rien de bon. Le côté arbitraire de la chose, on se dit qu'il n'y a pas de raison. Et quand même, le paysage, avec ses aspects de nouvelles fantastiques de Maupassant, nous laisse un sentiment de peur dans les yeux...
Silver - C'est drôle : dans tes textes, je retrouve souvent une sorte de fraîcheur, de tranquillité, même quand le sujet est grave. Tu as une manière de poser les choses que je trouve très rassurante et poétique : "il est encore trop tôt pour sortir". On sait qu'on parle possiblement d'un vampire, mais ça sonne comme une phrase qu'aurait pu dire une mère à son enfant... c'est doux J'aime beaucoup également la manière dont tu convoques les sens : "l'herbe sèche taquine ses narines...". Petite coquille à la fin : "tant que c'est supportable", et pas "temps"
- Leer
- Messages : 173
Date d'inscription : 16/08/2018
Re: Boum bébé ! Thème image.
Lun 22 Nov 2021 - 1:05
- Malnir:
- Dès le premier paragraphe, belle description, je me sentais mal à l'aise avant que tu exprimes le mal à l'aise du narrateur ! Mention spéciale pour le coton, ça produit un effet court-métrage en stop-motion je trouve qui est rare dans tes textes et fonctionne à merveille. Je suis impressionné par ce petit texte, qui aurait eu toute sa place dans nos écrits horrifiques d'Halloween dernier. Avec peu de choses tu crées une forte sensation.
- SolalCendre:
- Stylé, cette rencontre avec la sorcière ! Je trouve ça habile qu'il y ait eu des codes de genre rigide plantés tout le long du texte et qu'ils explosent au moment de la sorcière. Est-ce que c'est étonnant que ça me parle... Non xD
Il y a certains trucs qui m'ont moins plu : la branche salope, quelques descriptions un peu trop emphatiques pour me toucher, mais l'un dans l'autre j'ai apprécié cette lecture.
Je trouve que le début fonctionne bien, cette impression lancinante, ennuyeuse et morose, quand tu parles des joncs et du pont que personne n'emprunte, je me sentais comme si j'habitais dans ce village : à la fois une envie de fuir et la certitude qu'il n'existe aucun lieu accueillant hors de ce hameau paumé. C'est désespérant.
Ca fait longtemps que je n'avais pas entendu « purée de poix », c'est trop bien cette expression !!
- Silver:
- J'ai trouvé ce texte sombre et apaisant, la maladresse du personnage est attachante. Et le parfum de l'herbe sèche est un plaisir !
- ziel
- Messages : 23
Date d'inscription : 12/09/2020
Re: Boum bébé ! Thème image.
Lun 22 Nov 2021 - 14:04
- malnir:
- Malnir
J'ai bien aimé l'ambiance de ton texte, ça m'a fait penser à un début de chair de poule, les bouquin d'horreur. Un mystère pesant qui va faire exploser un quotidien bien huilé. Mais je trouve que ton texte, surtout pendant l'intro, a besoin d'être épuré, allégé. C'est pleins de petites répétitions qui empêchent d'aller à l'essentiel. je trouve que tout le malaise que tu installe et qui s'impose dans la deuxième partie de ton texte, gagnerait en intensité.
je passe en analyse de texte, mais ça m'a aidé à mieux lire et apprécier ton texte que de décortiquer tout ça.
Dans ''on dit que la colline'' il y a « qui ont été creusés » et « dans les parages », qui alourdissent pour rien. Alors que ta phrase est très bien sans tout ça.
et le souvent est pas nécessaire, y'a déjà une indication de régularité avec le weekend
et dans la phrase «Souvent, je trouve l’endroit si triste» : "souvent" casse la dynamique de la phrase. faut que ce soit direct, c'est le constat d'un malaise.
le « peut-être » de « ces buissons rachitiques, peut-être » est pas nécessaire, y'a déjà « pourquoi » dans la phrase d'avant, et ces interrogation, tu les exprime clairement dans ta phrase suivante.
« Il y a quelque chose de la friche là dedans » le « de la friche » est pas nécessaire, je trouve qu'en l'enlevant, on garde une petite zone d'imaginaire sur à quoi ressemble cette zone abandonnée, et puis ça allège le reste de ta phrase, en accentuant sur ce « là dedans », qui remet une couche d'étrange, c'est un truc pas net.
Mais conserver la friche, c'est tout aussi bien, le mot défini l'endroit, on se l'imagine bien, mais dans ce cas, là dedans est de trop.
- solal cendre:
- j'ai une image de ville aux couleurs délavées, un peu dans les teintes de donjon, époque poltron-minet, avec son petit pont gardé par un petit gobelin, et sa ville en déliquescence.
Y'a tout pleins d'images de sensations, de sons, de la matière à toucher. Je trouve ça assez délicat, et bien immersif, un petit conte poisseux mais mignon.
- Malnir
- Messages : 88
Date d'inscription : 18/09/2018
Re: Boum bébé ! Thème image.
Mar 23 Nov 2021 - 23:28
- Solal Cendre:
Ton texte avait régulièrement un côté très doux et cotonneux, très patelin anglais, et en même temps une tonalité aigre, glauque, type Insmouth. Ma foi, le mélange est des plus efficace ! Et cette petite histoire de l'enfant qui se perd dans les bois et qui, de ce que je comprends, au lieu de retrouver son chemin, trouve un nouveau chez soi de façon si incongrue, laisse penser à quel point la vie à ce village est abominablement lugubre pour qu'une sorcière sinistre lui paraisse plus réconfortante. Ca poisse le mal-être. Très agréable lecture, qui je crois a cela dit une sorte de défaut rythmique que j'ai du mal à repérer.
- Silver:
Ton texte a un côté détaillé mais sans fioritures inutiles pour autant, comme souvent, tu uses du présent de narration pour rapprocher le lecteur du personnage,e t c'est assez efficace. C'est d'ailleurs une de tes marques de fabrique je trouve, un côté assez précis, épuré et un temps présent. Le personnage a ce côté maladroit de celui qui vient a peine de s'éveiller, on en sait assez pour deviner sa nature, et ce que tu en dévoile est nécessaire et suffisant, ce qui est un bel équilibre : en ce sens, ton texte est complet. Bien sûr, tu pourrais lui trouver une suite, mais elle serait (j'imagine) séparée d'une ellipse : ce texte serait un joli "prologue" à un texte plus long, mais il n'en a pas besoin pour exister.
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